Depuis 2002, Paliss’art inscrit la volonté de la Ville de Liège de promouvoir la création artistique contemporaine au coeur de la ville en introduisant dans le paysage urbain la peinture murale. L’opération a réalisé une centaine de fresques et invité plus de 150 artistes opérant sur des supports aussi variés que des palissades de chantier, des pignons, des façades aveugles, des cabines électriques, ...
Paliss’art 2002-2024
Paliss’art est né il y a 22 ans, à l’initiative de la Ville de Liège et spécialement d’une rencontre entre Michel Firket, échevin alors en charge du Tourisme, du Cadre de Vie et de l’Art public et quelques jeunes artistes actifs dans les arts urbains, qui formeront en 2004 l’asbl Spray Can Arts. Cette asbl est l’opérateur du projet depuis ses débuts.
Partant du principe que l’art public est révélateur du dynamisme et de la qualité de vie d’une ville, l’objectif premier était de mettre la vie quotidienne en couleurs et de panser ainsi de nombreuses blessures urbaines.
Mais il s’agissait aussi de reconnecter la ville à ses habitants et à ses utilisateurs, de favoriser les rencontres d’artistes avec les pouvoirs publics et avec le « grand public » et d’offrir les œuvres aux passants, qu’ils soient Liégeois, utilisateurs de la ville ou encore touristes… L’art descend dans la rue et devient acteur de la vie urbaine en créant un signe identitaire de ralliement et de convivialité dans l’espace commun, ouvert à tous et proposé à chacun.
Sur les cent fresques créées dans le cadre de ce projet, une quarantaine sont encore visibles aujourd’hui. Le street art, caractérisé par le renouvellement de sa production publique, plus ou moins éphémère, accompagne ainsi le processus d’évolution de la vie urbaine et la métamorphose de la ville.
L’évolution du projet
En plus de 20 ans, le projet a bien sûr évolué, en réponse et parallèlement à l’évolution du regard et de la perception des citoyens à l’égard du street art, perception qui a très largement changé au cours de ces dernières années. Si les interventions des premières années étaient plus modestes, en gagnant la confiance du public, l’opération s’est affirmée en s’appuyant sur ces nouveaux axes :
• Comptant à ses débuts sur la participation bénévole des artistes, l’opération s’est aujourd’hui professionnalisée pour encourager la diffusion et la promotion des artistes et donc rémunérer leurs créations à leur juste valeur.
• L’objectif n’est plus seulement d’intervenir sur des murs dégradés, mais la priorité se porte principalement sur leur visibilité et leur accessibilité au plus grand nombre… même si le projet entend toujours investir également dans des interventions de quartier.
• Avec les années, l’opération s’est orientée davantage vers un muralisme plus monumental, proposant des interventions de grande dimension. C’est cette monumentalité qui aide l’art urbain à le rendre visible au regard de tous. Prenons en exemple L’Homme de la Meuse : cette fresque réalisée en 2019, d’une superficie de 1.200 m², est la plus grande de Belgique. Elle est devenue l’étendard de l’opération et de la ville de Liège en général. Œuvre en diptyque qui se déploie le long de la dérivation, qui fait corps avec le fleuve et avec le bâti urbain dans une perspective parfaite, elle était la 77ème réalisation de Paliss’art mais c’est elle qui a vraiment révélé l’opération aux yeux de tous.
• Le projet propose également désormais un équilibre entre les travaux des artistes liégeois et l’ouverture aux artistes belges et internationaux. C’est aussi cette alternance et cette émulation internationale qui garantit le niveau de qualité atteint aujourd’hui.
• L’opération est sans doute actuellement moins axée sur les diversités des supports et des techniques, se focalisant davantage sur un style au caractère plus urbain, à la bombe, dans l’esprit d’un muralisme résolument « street art ».
L’évolution de la perception du street art
Depuis quelques années, il n’est plus nécessaire de faire apprivoiser l’art urbain comme à ses débuts, nous ne devons plus persuader les propriétaires de mettre à disposition leurs murs pour accueillir une œuvre, ce sont eux qui nous proposent spontanément leurs biens pour faire partie de notre parcours street art… Quant au public, il réclame plus de fresques. En 2017 et en 2019, les deux consultations populaires menées par la Ville de Liège, Réinventions Liège et Liège 2025, ont clairement plébiscité la réalisation de fresques comme un axe prioritaire pour Liège.
Le succès du street art ne cesse donc de s’amplifier. Pendant les confinements, c’est la seule manifestation artistique qui est restée accessible même quand la vie culturelle était paralysée. C’est alors qu’il s’est particulièrement révélé à la vue de tous, comme un outil de culture à part entière, toutes générations confondues. A côté des partages instagram et FB, on ne compte plus aujourd’hui les mémoires d’étudiants (ce qui signifie aussi que le street art peut faire l’objet de travaux scientifiques) et la culture urbaine attire désormais l’attention des médias plus traditionnels comme les émissions télévisées, reportages radiophoniques, magasines de voyages, blogs …
Et lors de la réalisation des fresques, dans l’espace public, c’est un partage, un échange de réactions -quasiment toujours positives- qui se fait, entre les riverains ou les passants, souvent d’ailleurs avec les plus âgés, et le/les artistes. Pour ces nouveaux publics, le fait de voir éclore une œuvre, de découvrir sa construction jour après jour et d’en discuter avec l’artiste, cette promiscuité avec l’objet d’art qui est né sous leurs yeux, est garante d’une appropriation, d’une reconnaissance. L’œuvre qu’ils vont voir dans leur environnement quotidien leur appartient désormais.
Liège, ville de street art
Cette nouvelle identité que Liège a acquise au fil du temps la positionne maintenant aux yeux du public liégeois et non-liégeois en tant que ville de street art. Et cette position a fait des émules : de nombreuses autres initiatives en matière de street art ont éclos en dehors de Paliss’art (initiatives citoyennes, privées ou publiques) puisque cette nouvelle expression artistique est aujourd’hui largement défendue par le pouvoir politique. A Liège mais aussi dans toute la Province, car nous sommes également très souvent sollicités par d’autres communes qui souhaitent mettre en place des programmes similaires.
Le street art, levier culturel, touristique et identitaire
La culture urbaine et l’art urbain contemporain sont devenus des acteurs opérant à part entière dans le champ culturel. Le street art contribue de façon significative à la valorisation territoriale et touristique de nos villes. C’est désormais une porte d’entrée de découverte d’une ville, un instrument pour sa promotion et un vecteur de sa qualité de vie.
Par son immédiateté, son accessibilité et sa gratuité, la légèreté de sa technique aussi, le street art est un vecteur de démocratisation efficace pour l’accès à la culture, un canal propice au développement de l’intérêt de publics non-initiés.
Mais il est aussi le garant d’un certain apaisement des espaces publics. En introduisant des couleurs dans leur quartier, en le revalorisant, en lui apportant de l’art et donc de l’attention, le message que nous voulons transmettre aux riverains est que ce quartier mérite le respect, l’intérêt, l’embellissement du pouvoir public que nous représentons… Par-là, c’est le respect des habitants vis-à-vis de ce lieu réinvesti que nous stimulons aussi.
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